Nous entendons souvent parler des 0.00001% de gens devenus millionnaires ou milliardaires grâce a des inventions géniales ou des idées qui ont changé le monde : Marc Zuckerberg, Bill Gates, Elon Musk, la liste est longue. Et nous serons tous d’accord pour dire que leur chemin n’est pas facile à répliquer. Ce sont la plupart du temps des gens possédant un mélange unique de génie, de capacité de travail, de propension à identifier les opportunités et de chance pure.
Il y a une seconde catégorie de personnes : celle qui avait déjà un gros patrimoine dès le départ et qui l’a fait prospérer mais qui a tendance à oublier de le mentionner. Donald Trump par exemple, en dépit de toutes les controverses qui existent à son sujet est connu pour être un investisseur immobilier de génie qui a multiplié exponentiellement sa fortune au fil des années. Ce qui est moins mentionné, c’est qu’il a démarré sa carrière avec un « modeste » capital de plusieurs millions de dollars.
Je pense qu’il y a plus à apprendre d’une troisième catégorie de personnes : celle qui est devenue riche sans être née dans le bon environnement, sans avoir jamais gagné de gros revenus, sans avoir le quotient intellectuel d’Einstein et sans avoir jamais crée aucune entreprise.
Impossible? C’est ce que nous allons voir.
Grace Groner : La secrétaire devenue millionnaire avec une seule action
Grace Groner est un cas assez unique dans le milieu de l’investissement car elle a bâti sa fortune avec… une seule action.
Madame Groner travaillait comme secrétaire pour le compte d’un grand groupe américain : Abbott Laboratories. Elle acheta donc en 1935 pour 180 dollars d’actions de cette société. Elle a ensuite réinvesti les dividendes de son investissement pendant 75 ans. Au moment de sa mort, tout le monde fut surpris de voir qu’elle était à la tête d’une fortune de plus de 7 millions de dollars.
Il s’est trouvé rétrospectivement qu’Abbott Laboratories était un investissement extraordinaire, la société fait toujours partie à ce jour des « dividend aristocrats » américains, c’est à dire des rares sociétés à avoir augmenté leur dividende chaque année de manière ininterrompue durant plus de 50 ans.
Beaucoup de gens comprennent d’un point de vue intellectuel comment fonctionnent les intérêts composés, mais l’exemple de Grace Groner permet de donner plus de couleurs au concept. Transformer 180 dollars en 7 millions peut sembler impossible. Et pourtant.
Il est cependant vrai que Madame Groner a eu beaucoup de chance dans son choix d’investissement et je ne recommanderais à personne d’investir l’ensemble de ses économies sur un seul titre.
Ronald Read : Le concierge qui valait 8 millions de dollars
Ronald Read était un homme modeste qui a exercé tour à tour les métiers de concierge et de pompiste. Il a toujours eu des revenus extrêmement modestes, et il a pourtant laissé derrière lui une fortune de plus de 8 millions de dollars (dont il a fait don à une librairie locale).
La surprise de la découverte de l’étendue de sa fortune fut telle que son histoire de retrouva dans de nombreux médias financiers (entre autres le Wall Street Journal et CNBC).
Selon sa femme « il n’investissait que dans ce qu’il connaissait et dans ce qui payait des dividendes ». Il a été calculé à postériori que pour accumuler sa fortune Mr Read avait du investir environ 300 dollars de son salaire chaque mois pendant 60 ans. A la fin de sa vie son portefeuille boursier versait 20 000 dollars de dividendes chaque mois.
Il était également plus diversifié que l’exemple que nous avons donné précédemment puisque selon la presse financière, son portefeuille était composé d’une centaine d’actions différentes.
Voici la liste de ses 10 plus grosses positions selon le Wall Street Journal :
Comme vous pouvez le voir, il y a encore une fois beaucoup d’aristocrates du dividende dans le lot et de grosses sociétés solides et bien établies dans leurs secteurs respectifs.
Anne Scheiber : la contrôleuse des impôts qui pesait 22 millions de dollars
Anne Scheiber travaillait comme contrôleuse pour le compte du fisc américain (l’IRS). Elle n’a jamais gagné plus de 4000 dollars par an et elle aurait commencé à investir en 1944 avec seulement 5000 dollars d’économies en poche. En auditant régulièrement les comptes de riches particuliers pour le compte de l’état, elle se rendit compte d’une chose : les plus riches avaient tous tendance à détenir beaucoup d’actions.
Partant de ce constat elle s’est retroussée les manches et a utilisé ses compétences professionnelles pour analyser les bilans des sociétés avant d’y investir son propre argent. Au moment de son décès en 1995 (soit 51 ans après son premier investissement), elle avait bâti une fortune de 22 millions de dollars en démarrant de quasiment zéro.
L’exemple d’Anne Scheiber est également intéressant car elle était la seule de cette liste à utiliser des méthodes avancées pour sélectionner ses actions, et comme vous pouvez le voir elle a accumulé beaucoup plus d’argent en beaucoup moins de temps que Mr Read ou Mme Groner (c’est pour cela qu’il est important de sélectionner les meilleurs actions).
Il est dit qu’au cours de sa vie professionnelle et malgré le fait d’avoir été une employée irréprochable, Anne Scheiber n’a jamais obtenu une seule augmentation de toute sa carrière à cause de la discrimination à l’égard des femmes qui existait à cette époque là, et de l’antisémitisme omniprésent dans les institutions américaines au milieu du 20eme siècle (elle a d’ailleurs fait don de sa fortune à une association de lutte contre les discriminations au moment de sa mort).
Je pense que son histoire est riche d’enseignements, surtout dans un monde du travail en pleine mutation et souvent difficile comme celui que nous vivons aujourd’hui. Nous sommes beaucoup à comprendre que l’on ne peut plus compter uniquement sur le bon vouloir d’un patron pour ce qui est d’obtenir (ou pas) une augmentation. Partant de ce constat il existe deux manières de prendre les choses : râler à propos du contexte économique difficile en Europe et croiser les doigts en espérant que les choses changeront (ou pas) miraculeusement, ou bien faire comme Anne Scheiber (qui a probablement eu une vie bien plus difficile que la notre) et reprendre soi même les choses en main.
Conclusion
Mr Read, Mme Groner et Mme Scheiber n’avaient peut être pas les connaissances financières de Benjamin Graham ou de Warren Buffett mais ils possédaient néanmoins 3 éléments importants manquant à beaucoup d’investisseurs : la patience de laisser leurs investissements grossir, la discipline d’investir régulièrement, et le courage de conserver leurs titres durant des marchés baissiers qui auraient fait trembler plus d’un investisseur chevronné (1972/1974, 2000/2002 et 2008 pour ne citer qu’eux). D’aucuns diront également (à juste titre) : la chance d’être né et d’avoir investi aux Etats-Unis au bon moment.
On parle moins dans les médias de Mr Read, Mme Groner et Mme Scheiber que des personnes évoquées dans l’introduction de cet article (en fait je doute qu’aucun quotidien ou média francophone en dehors de ce modeste blog ne leur ait jamais dédié un article) et pourtant, je pense que leur exemple serait peut être plus inspirant et riche d’enseignements que ceux qui nous sont souvent donnés.
Si tout le monde n’est pas né avec les aptitudes permettant de devenir Bill Gates ou Marc Zuckerberg, tout le monde est né avec les capacités suffisantes pour suivre l’exemple d’Anne Scheiber ou de Donald Read.
Sandy says
Bonjour,
Le dernier exemple est très inspirant.
Merci pour ce rappel simple des trois clés pour réussir en bourse :
– patience
– la discipline
– courage
à contrarie, l’avidité et les émotions sont à éviter.
Bon dimanche à toi
Pierre says
Bonjour Sandy,
Tout à fait, on peut d’ailleurs noter que les 3 personnes évoquées dans l’article avaient toutes un style de vie modeste en dépit de leur fortune, et ont fait don d’une large majorité de leurs gains à des associations ou des causes qui leur tenaient à coeur.
Ludo says
Bonjour Pierre,
Intéressant cette article ! merci.
Par contre quand faut il investir dans les actions a dividend aristocrats ? y’a t il une analyse a faire de l’action avant d’investir ? ou sans trop se poser de question de façon mensuel ou annuel ?
Pierre says
Bonjour Ludo,
Oui si l’on veut bien faire les choses il faut analyser chaque action individuellement selon un ensemble de critères qui sont expliqués en détails dans la formation (accessible via l’onglet du même nom), pas uniquement sur leur historique de dividendes.
Les listes de dividend aristocrats ne constituent qu’une première base de travail pour trouver des titres de qualité.
Max Weber says
Hello
J’avais déjà entendu ces histoires quelque part mais je ne m’en rappelai plus. Merci à toi
Même s’il faut beaucoup de patience, je suis content de faire parti de la 3eme catégorie !
Si vous voulez vous diversifier et avoir une performance honorable (+ de 10%/an) je vous conseille de constituer un portefeuille type « momentum » en y mettant 1/4 actions, 1/4 obligations, 1/4 immo et 1/4 gold. C’est très connu aux USA mais beaucoup moins en France.