L’immobilier reste à ce jour le « placement préféré des français », et celui sur lequel comptent la plupart des gens qui ont du capital à investir pour s’assurer un complément de retraite… voire l’essentiel de leur retraite en fonction de leur profil.
Le plan de base étant le plus souvent de s’acheter un ou deux appartements pour se faire un complément de revenus avec les loyers…
Voir même pour les plus ambitieux d’autofinancer plusieurs appartements (chose plus difficile maintenant avec les taux à 3%) avec un petit crédit sur 20 ans, car la retraite à 64 ans bat de l’aile, et que nous vivons basiquement à une époque où vous pouvez obtenir le montant d’une retraite moyenne en louant 2 appartements.
Et c’est un plan que j’ai moi même suivi ici (en plus de mes activités en bourse, je suis moi même loueur en meublé depuis plusieurs années), donc je peux vous faire un retour honnête ici sur ses avantages et ses inconvénients.
Et il se trouve que l’immobilier possède selon moi un gros désavantage et un défaut majeur par rapport aux autres placements (surtout par rapport à la bourse et aux placements traditionnels)… que je vous propose de voir plus en détails ici, car il me semble qu’il n’est que trop rarement abordé!
(P.S : Mon but ici n’est pas de tacler l’immobilier mais plutôt de réhabiliter les autres placements aux yeux des français par rapport à l’immobilier… qui me semble parfois vu quelque peu à travers une paire de lunettes rose en France, à plus forte raison sur Youtube).
Table des matières
1/ Ce que les français apprécient en immobilier…
Ce qui pousse les français à choisir l’immobilier plutôt que les autres placements, c’est le plus souvent la possibilité de toucher un loyer plus ou moins sûr tous les mois, et de se générer ainsi un « revenu passif » (entre guillemets) qui leur permettra de financer leurs dépenses courantes une fois le crédit remboursé et l’appartement financé.
… et il n’y a rien de mal à cela. C’est plutôt un bon plan de base, et vous serez quasiment toujours en meilleure situation financière avec un ou deux biens immobiliers à votre actif que sans (du moins si vous choisissez de bons investissements, et que vous vous tenez loin des pièges du secteur).
Le problème ici me semble juste être que si vous investissez dans la pierre essentiellement pour « le complément de retraite » ou pour « vivre de vos loyers« … c’est à dire avec l’idée de rentrer une somme d’argent fixe tous les mois qui vous garantisse de couvrir vos dépenses courantes… vous risquez d’être amèrement déçus.
Je m’explique.
2/ Le « Cashflow sûr » de l’immobilier est une illusion
Si je vous embauchai comme employé, et que je vous disais que le mois prochain je vous paierai 2000 euros, le suivant 1500, puis qu’ensuite nous verrons en fonction de l’état de l’entreprise, mais que cette somme pourra être comprise entre 2000 et 0 euros en fonction des dépenses de la société, cela vous paraitrait-il attractif?
Et si ce salaire représentait 100% de vos revenus, est-ce que vous seriez serein vis à vis de vos perspectives de stabilité financière?
Peu de gens le seraient, pourtant c’est ici le type de contrat que vous signez indirectement en devenant investisseur immobilier.
Vos revenus brut maximum sont certains et ils sont « capés » comme on dit en finance (c’est à dire qu’il s’agit du loyer que vous verse votre locataire annuel, vous n’aurez jamais plus), mais vos revenus réels nets sont incertains et même potentiellement négatifs (il s’agit de vos loyer ajustés de tous les frais, de toutes les dépenses, et de tous les imprévus en fin d’année).
De ce point de vue et par rapport à d’autres investissements plus traditionnels, l’immobilier est un des placements les moins « sûrs » que vous puissiez faire en terme de cashflow, car le fait est que vous ne savez jamais exactement combien vous serez payé en fin d’année.
Si vous avez du mal avec cette idée, je vous propose de raisonner par rapport à des investissements qui proposent un vrai cashflow « sûr » pour constater de la différence.
3/ Un vrai Cashflow « sûr »
Si vous prenez un placement comme le Livret A ou les Obligations, qui sont des placements défensifs par nature, vous pouvez calculer en début d’année combien vous aurez en fin d’année grosso modo.
Si vous investissez sur un support qui doit vous rapporter 4% : vous savez à l’avance que vous aurez 4% (moins les éventuelles taxes).
Même si vous décidez d’investir sur un support dit « risqué » en bourse, comme les actions par exemple, le cours de l’action pourra fluctuer, mais si vous investissez disons dans Air Liquide ou Coca-Cola, vous savez que vous aurez toujours 3% de dividendes, peut être moins si l’entreprise à mal performé…
Mais ce dont vous pouvez être sûr, c’est qu’en fin d’année vous ne devrez jamais de l’argent à Coca-Cola.
Une société ne viendra jamais vous réclamer de l’argent pour que vous puissiez conserver votre investissement.
L’inverse n’est pas vrai en immobilier.
En immobilier, il faut réaliser que le montant des loyers bruts que vous percevez n’est qu’indicatif et théorique, et que vous ne saurez en fait qu’à la fin de votre année comptable combien vous aurez réellement dans votre poche… voire même si votre année a été profitable tout court.
En effet l’immobilier implique un gros montants de frais et de charges réguliers… et surtout un gros gros montant d’imprévus et d’impondérables.
C’est un des seuls placements en dehors du capital investissement ou vous devrez régulièrement remettre la main à la poche… et ou vous pouvez perdre le bien sur un mauvais calcul (ou être obligé de vendre).
C’est à dire un des seuls placements qui à dans son spectre des possibilités de soustraire du cash de votre compte courant bancaire pour une année donnée au lieu d’en ajouter.
Et la majorité des investisseurs particuliers sous estiment lorsqu’ils se lancent la vitesse à laquelle leurs loyers annuels peuvent être dévorés par des imprévus (ce qui n’a pas manqué de mettre beaucoup de gens que je connais dans des situations délicates…)
Un exemple concret
Prenons un loyer théorique de 500 euros par mois, soit 6000 euros au total sur l’année.
Quelques dépenses hypothétiques (dont certaines qui me sont arrivées personnellement) :
- Un dégât des eaux, et c’est entre 2000 et 3000 euros qui peuvent partir (pas toujours remboursé par l’assurance). La moitié de vos revenus annuels sont déjà partis. Et c’est sans compter : les taxes, les charges, les autres frais.
- Si vous êtes en copropriété vous avez vite fait d’avoir un appel de charges pour réfection de toit, ravalement façade, réfection de cage d’escalier qui passe vos charges de 1000 à 3000 euros par an.
- Un chauffe-eau qui casse? 800 euros.
- Une intervention de plomberie? 300 euros.
- Un couchage à changer? 700 euros.
L’idée est la suivante : si les loyers sont certains, le montant que vous avez dans votre poche en fin de l’année ne l’est pas du tout. Fonction du nombre de coup du sort totalement aléatoires et sur lesquels vous n’avez pas le contrôle qui frapperont votre logement cette année.
La plupart des gens voient un loyer comme « sûr », et un placement financier comme « pas sûr », mais si vous comparez 6000 euros sur un appartement à 110 000, et 6000 euros versés par un bon du trésor…
Votre locataire comme l’émetteur peuvent faire défaut, mais dans le second cas vous êtes sûr de combien vous aurez en fin d’année. Ce qui, dans l’optique d’un « revenu principal de retraite » me parait un atout majeur.
Si vous achetez 2 appartements « pour votre retraite » qui doivent vous rapporter 10 000 euros par an, vous risquez d’avoir des problèmes si vous tablez sur ce niveau de revenu et que vous vous retrouvez avec seulement 5000 pour boucler l’année.
Bien entendu le problème est mitigé pour les gens qui ont 8/10/15 appartements, mais je pense pouvoir dire sans me tromper que si la plupart d’entre nous finissent avec 1 ou 2 biens en locatif, ils sont déjà loin devant la plupart des gens en terme de finances personnelles et de patrimoine.
… Et pourtant vous ne devriez pas miser « que » sur cela, car vous aurez vite fait de vous retrouver sous l’eau en cas de problème.
Vous pensez que j’en rajoute au niveaux des dépenses, prenons ces 2 dernières années.
4/ L’exemple de 2023
Plutôt que des problèmes spécifiques liés à chaque logement, je vous propose de voir ici des problèmes d’ordre généraux qui ont eu lieu ces 2 dernières années, c’est à dire des problèmes auxquels tous les propriétaires ont du faire face :
Les taxes foncières ont augmenté de façon démesurée (50%+ en région parisienne).
Vous aviez 1000 euros de taxes à payer par an?
Et bien félicitations, en 2023, en fonction d’où se situe votre bien, ce sera peut être 500 euros de plus (je vous conseille d’ailleurs de bien vérifier si vous êtes propriétaire car elles seront débitées à la fin du mois).
Les taxes foncières ont augmenté de plus de 50% en région parisienne, la raison principale avancée pour cette hausse étant la suppression de la taxe d’habitation. Comme vous pouvez le constater l’état donne, et l’état reprend.
Et ce n’est pas ici une petite hausse, car ceux qui étaient déjà sur 2000 euros de taxes ou plus peuvent devoir se retrouver à débourser plus de 1000 euros supplémentaires ce mois-ci.
Mais ce n’est pas tout.
Les loyers n’ont pas suivi l’inflation
Un des avantages clé de l’immobilier, c’est que c’est un placement qui est sensé préserver votre pouvoir d’achat durant les périodes d’inflation.
En effet, les loyers sont indexés sur un indice de référence des loyers, qui est réévalué chaque année en fonction de l’inflation. Un bon placement est supposé au moins préserver votre pouvoir d’achat de l’inflation, et c’est plus ou moins la base ici pour qu’un placement soit intéressant.
… Du moins bien sûr c’est la théorie avant que l’état ne s’en mêle. Et ne décide de plafonner l’indice des loyers à 3,5% cette année.
Conclusion en temps de propriétaire : vous subissez tous les coûts liés à l’inflation (hausses des charges, hausse des frais courants, hausse de la taxe foncière), et en contrepartie vous ne récupérez rien car vos loyers sont plafonnés.
Mais attendez, ce n’est encore qu’un problème modeste par rapport à la suite.
Les nouvelles normes environnementales
A partir de cette année, les logements considérés comme « à forte consommation énergétique », ou ne répondant pas aux nouvelles règles fixées par l’état seront tout simplement interdits à la location.
Le problème ici, c’est que vous n’êtes pas forcement responsable de ce qui avait été fait en terme d’isolation dans un immeuble construit en 1950… et que vous vous retrouverez donc maintenant à devoir isoler votre appartement de l’intérieur pour compenser des constructions qui ne sont désormais « plus aux normes » selon l’état.
Et croyez bien qu’il s’agit ici d’un grand nombre de logements, et que les sommes a engager sont souvent conséquentes. Pour preuve, beaucoup de propriétaires envisagent simplement de vendre, et il n’est pas rare que les sommes à engager dépassent ici les 20 000 euros.
Espérons ici que vous les avez si vous êtes investisseurs, sans quoi les années à venir risquent de ne pas être simples.
Conclusion
L’immobilier est il un mauvais placement? Non pas du tout, c’est juste que personnellement j’ai l’impression que la plupart des gens se lancent dans le projet en considérant le cashflow comme « sûr » et en sous estimant vastement les impondérables potentiels.
La plupart des français se disent très averses au risque et n’investiront jamais en bourse sur une action par exemple qui verse des paiements fixes depuis plus de 30 ans, mais ils sont prêts à considérer comme « sûrs » des montants de loyers qui, en net, seront en réalité très incertains.
Le montant qui arrive tous les mois donne une illusion de sécurité, mais le montant final de ce que vous avez en poche est sans doute le plus difficile à estimer de tous les actifs financiers à votre disposition, parce que les impondérables annuels ne sont tout simplement pas calculables à l’avance.
L’immobilier est sans doute le placement champion de la charge imprévue (prenez encore les taxes foncières qui ont augmenté de 50% dans certaines villes), et j’ai toujours trouvé cela incroyable que le placement soit considéré comme « sûr » par beaucoup de français.
Ne vous laissez pas avoir par l’illusion d’un loyer qui rentre tous les mois, ce que vous rentrez vraiment est le montant des loyers décaissé de toutes les charges, et du temps que vous avez pris à gérer tous vos ennuis annuels… ce qui vous pourriez vous en rendre compte au final, n’est pas toujours aussi rentable qu’espéré par rapport à d’autres options.
(P.S : N’hésitez pas à lire ou relire mon article « Bourse ou Immobilier? » pour un comparatif de rentabilité complémentaire entre les deux placements)
Michel de trading-attitude says
Bonjour, il y a une petite faute de frappe dans la phrase « Si vous avez du mal avec du mal avec cette idée, » on dirait.
Je suis tout à fait d’accord. Les frais d’isolation thermique peuvent couter 2 ans de loyers dans certains cas.
J’aime bien la tournure de l’article et le point de vue aborder pour expliquer que c’est le seul investissement qui coûte… Je n’avais pas vu cela comme ça.
Pierre says
Thanks c’est corrigé! (possible qu’il y ait encore quelques coquilles qui m’aient échappé dans celui-ci, car c’est une transcription un peu rapide de la vidéo!)