Pour compléter mon compte rendu 2021, je vous propose à travers cet article de revenir sur mon meilleur investissement à haut rendement de l’année, ainsi que sur ses performances détaillées.
Le titre affiche une performance de +80% sur 2021, avec des dividendes de 10% sur la position (ce qui est assez colossal dans un contexte de taux faibles à négatifs).
Comme vous vous en doutez, les rendements ne sont pas « classiques » et ce n’est donc pas un type d’investissement « classique ». Un retour ici sur le titre Iron Mountain.
(P.S : j’avais déjà évoqué le titre ici en juin si vous suivez le site depuis un moment. L’année étant terminée, j’ai désormais toutes les données pour faire un bilan final).
Table of Contents
Présentation d’Iron Mountain
Iron Mountain est une entreprise américaine spécialisée dans l’archivage et le stockage (sécurisé) de données pour les entreprises.
Si vous avez déjà travaillé aux archives dans le service d’une grande société : vous savez probablement que le stockage est à la fois une obligation règlementaire, et un problème ennuyeux pour beaucoup d’entre elles.
Iron Mountain apporte des solutions à ce problème. La société stocke de manière sécurisée les archives et les données de la majorité des plus grosses sociétés américaines (Fortune 500), avec un quasi monopole sur le secteur, et plusieurs centaines de milliers de mètres cube de stockage.
On pourrait penser à l’heure de la transition numérique et du « zéro papier » que le problème du stockage de données « physiques » en est de moins en moins un (c’est d’ailleurs une des raisons qui ont participé à la décote de l’entreprise), mais dans les faits, ce n’est pas le cas.
De nombreuses sociétés ont encore beaucoup de travail à faire coté transition numérique, d’autres travaillent encore avec des archives papiers pour des raisons qui leurs sont propres (sécurité notamment, il est impossible de « hacker » un dossier si il n’a jamais été digitalisé), et il y a tout simplement une masse incompressible de paperasse règlementaire dont tout le monde doit s’affranchir, et qui doit nécessairement être stockée quelque part.
C’est là que se situe le cœur de business d’Iron Mountain.
Notes sur la structure de la société
Iron Mountain, de par sa position sur le secteur du stockage, appartient à l’univers des REITS (Real Estate Investment Trust), et plus précisément au sous secteur des « Storage Centers« . Un business par essence assez stable et défensif (qui a d’ailleurs très bien traversé la crise du covid).
La structure de REIT d’Iron Mountain fait que la société n’est pas soumise à la double imposition classique qui peut toucher les sociétés « ordinaires », et en fait un véhicule générateur de rendement idéal pour les investisseurs qui recherchent avant tout des dividendes importants.
(Les REITS ont en effet une structure juridique particulière qui les oblige à « passer » plus de 90% de leurs revenus à leurs actionnaires, ce qui leur permet en contrepartie d’éviter certaines taxes).
Thèse d’investissement initiale
Depuis quelques temps déjà, Iron Mountain était un business en défaveur qui opérait dans un secteur en défaveur (le stockage papier dans un monde de plus en plus digitalisé).
Il faut préciser également que la société a quelque peu trainé les pieds au niveau transition numérique, et beaucoup d’investisseurs dans le domaine des « REITS » lui préféraient de beaucoup le secteur des « data centers« , qui offrait des perspectives de croissance plus dynamiques.
Cependant, ce ne serait pas faire justice à Iron Mountain que de simplement le considérer comme un « business dépassé », et la société possède en fait de sérieux atouts.
1/ Un « MOAT » dans son secteur
Ce qu’on appelle un « MOAT » en finance (ou « douves » en français) est un concept popularisé par Warren Buffett, qui est grosso modo une forme de barrière à l’entrée qui fait que vous avez un avantage que les autres business n’ont pas, et qui ne peut pas facilement être répliqué.
Buffett encourage à toujours investir dans des business avec un « MOAT » important et à éviter ceux qui peuvent être facilement disruptés. Alors quel est le « MOAT » d’Iron Moutain ici?

J’en reviens à ce que je disais dans le premier paragraphe, mais si vous avez déjà travaillé aux archives d’une société (ce qui fut mon cas quand j’étais étudiant), vous savez peut être à quel point l’archivage peut être contraignant.
Cela coûte de l’argent aux entreprises (car il faut payer des archivistes qui s’occupent de tout classer), du temps, et leur prend un espace considérable qui pourrait être utilisé pour des activités plus productives (car fondamentalement stocker du papier n’offre aucun retour sur investissement).
Ajoutons à cela qu’une fois stockés et classés, 10 ans d’archives papiers d’une compagnie « fortune 500 » constituent un volume de documents colossal, que vous ne voulez probablement pas vous amuser à déplacer d’une année sur l’autre sans avoir une très bonne raison.
Toutes ces contraintes physiques font qu’usuellement, les partenariats réalisés avec IRM sont des partenariats de long terme. Ce qui nous conduit au second atout majeur de la société.
2/ Un cashflow très stable
Les partenariats de long terme, et le coté naturellement défensif du secteur du stockage confèrent à la société un cashflow très stable et solide dans le temps.
Voyez plutôt ce qui s’est passé à ce niveau ces dernières années (malgré la crise du covid) :

Ce point est essentiel à vérifier quand vous avez des sociétés qui paient de hauts dividendes, car le problème majeur ici est souvent qu’à la moindre baisse de cashflow, une société qui n’a aucune marge de manœuvre coupera son dividende.
Mon analyse ici était que cela avait relativement peu de chance de se produire à moyen terme vu le buiness model et le cashflow dégagé par Iron Mountain… et malgré cela, la société payait un rendement très important, ce qui nous conduit au point suivant.
3/ Une décote importante
Comme évoqué précédemment, Iron Mountain n’a pas été une valeur très populaire au cours de ces dernières années. Au point que son prix a chuté (chute aggravée par le creux de marché lié au covid, durant lequel seules les sociétés favorites des investisseurs ont évité un brutal « sell off »).
Ici une valeur située dans un secteur jugé vieillissant, avec des perspectives incertaines dans un monde de plus en plus digitalisé n’avait pas (aux yeux du marché) d’arguments assez solides pour éviter la chute.

Cela a conduit le titre à coter sur des niveaux de prix très bas, à se traiter à des multiples de valorisation plus faibles que son secteur, tout en payant des dividendes plus de 2x supérieurs à la moyenne des REITS à la même période.
4/ Des leviers de croissance potentiels
Malgré sa position forte, Iron Mountain réalise bien que le secteur du « tout papier » n’est probablement pas voué à une croissance folle au cours des prochaines années (même si le cashflow lié à cette activité est pour le moment très stable).
La société a donc réalisé des investissements massifs dans le domaine du stockage de données en ligne. Ceci afin de pouvoir fournir à ses clients une solution de stockage complète et diversifiée (physique et digitale), qui sera vouée à croitre dans le temps.
Nous avions donc ici 4 éléments en place qui faisaient d’Iron Mountain un investissement à haut rendement intéressant. Observons donc maintenant les performances 2021.
Performances 2021 d’Iron Mountain
Voici les performances de l’action Iron Mountain sur le début de l’année 2021 :

Comme vous pouvez le voir, le titre a connu un rallye de près de 80% en 2021, contre +28% pour l’indice S&P sur la même période, et ceci sans compter les dividendes (élevés) du groupe.
Rendements et dividendes d’Iron Mountain
C’est là que les choses deviennent intéressantes, mais il était possible d’acquérir il y a encore peu de temps la société alors qu’elle payait des dividendes de 10%. La société paie aujourd’hui un dividende de 2.5 dollars par action, ce qui lui confère un rendement de 5.3% à début 2022.

En mai 2020, j’avais par exemple réalisé plusieurs achats entre 23 et 25 dollars :
Si vous faites le calcul, 2.5 dollars de dividendes annuels pour 25 dollars de prix moyen… cela vous fait 10% de dividendes sur la position (compte tenu des 1.4% de dividendes du S&P actuels, nous sommes donc ici sur du très haut rendement).
Comme je l’avais expliqué dans de précédents articles, si vous avez pour but d’arrêter de travailler ou de complémenter vos revenus dans un futur proche grâce aux dividendes, avoir un rendement de départ suffisant pour atteindre vos objectifs financiers est essentiel.
Et vous comprenez du même coup pourquoi le prix que vous payez vos actions est crucial : moins vous payez cher vos titres, plus votre rendement sera intéressant. Le prix payé est donc une composante cruciale de vos retours à long terme.
Risques liés à Iron Mountain
Bien entendu vous vous en doutez : nous n’avons pas ici des rendements de 10% en nous aventurant sur une « Blue Chip » classique. Cependant comme ce bref compte rendu vous l’aura présenté, nous avions un titre qui (à mon sens) se retrouvait injustement sous évalué.
Parmi les principaux risques, on peut citer la faible croissance, le risque de se faire dépasser par des concurrents coté transition numérique (certains « Data centers » ont déjà une longueur d’avance à ce niveau), et le risque d’opérer dans une industrie vieillissante (celle du « stockage papier »).
On peut aussi citer le fait que l’obligation de distribution élevée du secteur (90% + du cash disponible) fait que la société aurait relativement peu de marge de manœuvre en cas de baisse de son cashflow, qui serait donc plus facilement répercutée sur le dividende que sur des actions classiques.
Cependant, tous ces risques étaient très bien rémunérés par la faible valorisation du titre l’an dernier, et les marchés semblaient pricer (à tord à mon sens) Iron Mountain comme une valeur à très haut risque (sous estimant peut être la robustesse de son cashflow, qui, comme nous l’avons vu plus haut, à mieux survécu au covid que celui de beaucoup de sociétés).
Même si la croissance du titre s’avère au final assez faible : tout est question du prix que vous payez. Ici avec 10% de dividendes initiaux, seulement 2% de croissance suffiraient pour obtenir des rendements annuels de 12% (ce qui est en moyenne mieux que les indices boursiers, et probablement beaucoup mieux que des indices évoluant à des niveaux de valorisation records comme c’est le cas aujourd’hui).
Iron Mountain n’était tout simplement pas le genre de titre qui faisait « rêver » wall street, et si vous recherchez des actions orientées « value« , c’est exactement ce que vous souhaitez. En plus de cela, Iron Mountain est un REIT, donc pas exactement une action, et opère dans un secteur moins « mainstream » (et plus difficile à analyser) que celui plus populaire des valeurs technologiques (par exemple).
Conclusion
J’espère que vous aurez trouvé des choses intéressantes dans cet article, et qu’il aura contribué à vous éclairer quelque peu sur les méthodes que j’utilise pour trouver des investissements à haut rendement intéressants, tout en limitant les risques de me « bruler les ailes » (dans un secteur pas toujours facile à naviguer).
A noter que cet article n’est pas une invitation à acheter le titre aujourd’hui (après le dernier rallye, les risques liés au titre étaient bien mieux compensés à 10% de rendement qu’à 5%).
Cependant, comme présenté ici, acheter des titres présentant des rendements solides et de faibles valorisations peut souvent déboucher sur de gros rattrapages en terme de prix lorsque le marché décide soudainement de « réévaluer » sa position sur la société.
Bonjour Pierre,
Oui c’est intéressant mais c’est dommage que ce genre article arrive bien après la hausse lorsque les marchés sont sur des sommets. Dit autrement : après la bataille ! C’est dommage également que cette stratégie « value » n’apparaisse pas dans la formation payante (me semble t-il mais je me trompe peut-être). En effet Iron Mountain n’a pas un BNA qui fait rêver et vous indiquez dans la formation de se concentrer sur les entreprises avec un BNA croissant.
Il s’agit donc ici d’une stratégie différente de celle basée sur les dividendes croissants n’est ce pas ?
Allez vous conserver l’action ou était ce pour surfer sur la reprise ?
Bonjour Gaël,
En effet, comme mentionné ici, Iron Mountain n’est pas une action au sens traditionnel mais un REIT (Real Estate Investment Trust). Il est impossible aujourd’hui de trouver des actions « traditionnelles » qui paient des dividendes de 10% soutenables.
Pour cela il faut s’orienter vers des alternatifs (les REITS par exemple, bénéficient d’une structure fiscale favorable qui leur permet de « passer » leurs revenus sous forme de dividendes sans être doublement imposés dessus, ce qui leur permet naturellement de proposer des distributions plus élevés. C.F. mon article sur les REITS).
Aucune des métriques traditionnelles usuellement applicables aux actions ne fonctionne sur ces instruments, et ils sont plus complexes à analyser, c’est pour cela que je les ai regroupé (entre autres instruments) sous le label « bourse à haut rendement » (j’y explique plus en détails quelle est la grille d’analyse propre à chacune de ces catégories « high yield »).
(Également, cette partie « bourse à haut rendement » comprend un contenu plus technique, niché et avancé (et des instruments plus volatils) que la formation classique du site qui elle est destinée à tous. C’est pour cela que je ne la laisse pas disponible à l’année) ;
Il s’agit donc d’une stratégie un peu différente mais toujours orientée rendement (C.F la partie « haut rendement » de mes compte rendus annuels pour plus de détails à ce sujet). Et pour le moment, sauf changement fondamental majeur, je pense garder IRM en portefeuille ;
Bien Cordialement
J’ai aussi acheté la formation “bourse à haut rendement” et je confirme que c’est beaucoup plus technique et plus difficilement accessible (pour moi en tout cas). Pour preuve la façon d’analyser ces produits m’a échappé !
N’hésitez pas à m’envoyer un mail via la messagerie de l’espace de formation si certains points nécessitent des éclaircissements supplémentaires 😉
Oui d’accord. Merci.
En terme de REITS, le secteur du retail en Europe reste très sous-valorisé, notamment les centres commerciaux
Peut-être intéressant de regarder du côté d’Unibail-Rodamco-Westfield, qui malgré la coipe du dividende jusqu’en 2024, pourrait surprendre positivement lors des résultats en février prochain
Bonjour Alexandre,
Personnellement j’évite les valeurs qui ont coupé ou vont couper leurs dividendes (sur les REITS comme sur les actions). Historiquement celles qui ne coupent pas ont tendance à avoir de meilleurs perfs pour un investisseur de long terme (et il est impossible d’avoir une trajectoire des paiements similaire à celle présentée dans mon dernier compte rendu en incluant des valeurs qui coupent régulièrement leurs paiements : https://plus-riche.com/resultats-dinvestissement-2021).
Après tout dépend aussi de l’horizon d’investissement, de la stratégie, et des objectifs financiers de chacun ici ; Cdt
Merci pour cette analyse, je confirme : trés belle valeur ce Iron Mountain, je pense qu’elle a encore du potentiel niveau cours + rendement. J’ai également acheté des data center Coresite, Digital realty et QTS. Qu’en pensez vous ?
Je ne les connais pas toutes dans le détail ici, mais DLR est aussi une position que je détiens de longue date dans mon portefeuille de REITS. Les Datas Centers sont en revanche plutôt un investissement « croissance », alors qu’IRM était plutôt un investissement orienté rendement/value.
La plupart des data centers paient plutôt un rendement compris entre 2 et 3% ce qui est inférieur à beaucoup de REITS, en contrepartie de quoi ils ont des perspectives de croissance (du prix et des paiements) plus élevées.
L’important ici à mon sens, c’est surtout de faire attention aux valorisations (qui peuvent parfois être élevées), et de ne de pas les payer trop cher par rapport à la moyenne de leur secteur, et aux taux de croissance que l’on peut en attendre ; Cdt