Tout le monde aime les citations boursières! Au point que certaines d’entre elles sont devenues très présentes dans la culture populaire (si vous jetez un œil sur n’importe quel forum boursier, vous tomberez très probablement sur au moins une des six présentées dans cet article).
Mais si beaucoup de ces proverbes et adages sont le fruit d’une sorte de sagesse populaire ayant traversé les décennies : plusieurs d’entre eux sont souvent mal interprétés… ou simplement faux !
Ci-dessous, 6 citations boursières populaires qui peuvent conduire un investisseur à prendre de mauvaises décisions.
Table des matières
1/ « Pas vendu, pas perdu »
Pour commencer, voici ce qui est probablement l’un des proverbes boursiers les plus dangereux de cette liste.
L’idée initiale derrière cette citation est que vous ne devez pas vous laisser impressionner par les fluctuations du marché si vous essuyez un revers de fortune de court terme (ce qui est vrai… dans une certaine mesure).
Cependant, cette citation est trop souvent utilisée pour essayer de justifier de terribles choix d’investissement. Elle induit 2 idées fausses et dangereuses :
- L’idée que vos pertes ne sont « que virtuelles »
- L’idée que si vous attendez suffisamment longtemps, vous allez « vous refaire »
En vérité, si les pertes qui s’affichent sur une position ouverte ne sont certes pas « réalisées », elles n’en sont pas moins réelles si les fondamentaux d’une société se sont dégradés (et dans beaucoup de cas, vous ne reverrez jamais votre prix d’achat suite à une mauvaise décision).
De plus, l’idée même du « pas vendu, pas perdu » est intrinsèquement fausse. Même si vos actions ne vont nul part pendant 10 ans, vous aurez encaissé une perte bien réelle : le coût d’opportunité de ne pas avoir investi dans quelque chose qui vous aurait rapporté de l’argent.
Pendant que vos actions stagnent ou chutent, d’autres actions grimpent, et votre argent durement gagné serait mieux placé sur celles-ci.
Si un de vos investissements commence à tourner au vinaigre pour des raisons fondamentales réelles et justifiées (point essentiel), la bonne attitude est de couper votre perte, et de réinvestir dans un business avec de meilleures perspectives.
2/ « La diversification est une protection contre l’ignorance. »
Cette citation boursière est souvent sujette à controverse car elle est attribuée à l’oracle d’Omaha en personne : Warren Buffett (qui usuellement est plutôt de bon conseil). Hors, elle est souvent mal interprétée (ou utilisée pour justifier des prises de risque excessives).
Une autre variante souvent citée (toujours en provenance de Buffet) est « une large diversification n’est requise que si vous ne savez pas ce que vous faites ». Le problème ici est que le mot « large » est très subjectif.
Si vous jetez un œil au portefeuille de Warren Buffet aujourd’hui : vous constaterez que celui-ci contient plus de 40 valeurs. Pour lui, ce n’est pas ici une « large » diversification (des investisseurs comme Peter Lynch ont réussi à générer des performances extraordinaires avec plus de 100 titres en portefeuille).
Cette citation est souvent utilisée par les spéculateurs qui aiment concentrer leurs paris sur 3 à 5 titres (l’argument principal étant qu’un portefeuille concentré permet de s’enrichir plus vite). Le problème, c’est que Buffett lui-même n’a jamais eu un tel niveau de concentration.
En vérité : Un portefeuille très concentré est nécessairement un portefeuille très risqué. Et personne ne pouvant savoir exactement de quoi le futur sera fait (la preuve encore cette année avec la crise surprise du covid) : tout le monde (même Buffett) a besoin d’un certain niveau de diversification dans ses placements.
3/ « Personne n’est jamais devenu pauvre en prenant ses profits. »
Ce proverbe boursier est trompeur car il semble logique au premier abord.
Le meilleur contre-argument à cet adage boursier populaire a sans doute été donné par Jesse Livermore dans son livre « Mémoires d’un spéculateur » : « Personne n’est jamais devenu riche non plus en prenant un profit d’un demi-pourcent au beau milieu d’un marché haussier ».
En bourse (pour présenter les choses simplement), vous ne pouvez générer que 4 types de retours :
- De gros gains
- De grosses pertes
- De petits gains
- De petites pertes
Prendre ses profits rapidement revient à couper vos chances de réaliser de gros gains. Couper les gains et laisser courir les pertes est l’exact opposé de ce qu’il faut faire si vous voulez faire grossir votre compte de bourse.
Toutes les statistiques boursières réalisées au cours de ces dernières années ont démontré que la plupart des performances des meilleurs gérants et traders provenaient d’une petite minorité de titres générant des performances extraordinaires.
Si vous n’avez pas la force morale de laisser courir vos gains aussi longtemps que nécessaire sur ces positions sans les vendre : il vous sera très difficile de réaliser de bonnes performances.
Ce qui nous conduit à la citation suivante.
4/ « Les arbres ne montent pas jusqu’au ciel »
C’est ici une citation boursière qui est régulièrement utilisée par les investisseurs qui ont « raté le train » sur des actions à fort potentiel, et qui restent sur le bas-côté pendant des années en regardant les prix leur échapper (sous prétexte que « les arbres ne montent pas jusqu’au ciel »).
Il est vrai qu’il n’est pas sain que la valeur d’un titre ne s’éloigne trop de sa valeur fondamentale en bourse (c’est dans cette vérité que cet adage boursier prend ses racines).
En revanche, il est aussi vrai statistiquement que la plupart des bons titres auront tendance à grimper bien plus loin que la plupart des gens n’y sont psychologiquement préparés.
Une performance de 100 000% vous parait-elle absurde? Voici les performances de 5 géants américains depuis leurs introductions en bourse respectives :
Si vous avez en tête le proverbe que « les arbres ne montent pas jusqu’au ciel », cela pourrait rendre difficile pour vous de conserver suffisamment longtemps vos positions gagnantes pour en récolter les fruits.
En vérité : peu importe qu’une action soit déjà montée de 50%, de 100% ou de 1000% dans le passé si cette hausse est ancrée dans des fondamentaux solides (et que la valorisation boursière n’est pas devenue excessive).
Usuellement vous mettrez plus les chances de votre coté en achetant des valeurs qui ont montré qu’elles sont capables de créer de la valeur année après année qu’en achetant des titres qui ne vont nulle part depuis 10 ans (même si ils sont « peu chers » en terme de prix).
5/ « Acheter la rumeur et vendre la nouvelle »
L’idée de base derrière cette citation boursière est d’acheter le pessimisme et de vendre l’optimisme, ce qui n’est pas une mauvaise idée sur le papier, mais s’avère dans les faits un peu plus complexe que de simplement « acheter une rumeur, et vendre une bonne nouvelle ».
Si vous achetez toutes les rumeurs qui courent à Wall Street, vous allez vite vous retrouver à court d’argent. Et comme je l’ai expliqué plus en détails dans mon article sur la saison des résultats : toutes les nouvelles ne sont pas bonnes à vendre.
En fait beaucoup d’argent peut être gagné après qu’une bonne nouvelle ne soit publiée (et beaucoup d’argent peut être perdu sur de fausses rumeurs).
Le plus important lorsqu’une nouvelle est publiée, c’est l’écart avec les attentes initiales du marché. Les prix peuvent bondir à la hausse suite à une mauvaise nouvelle moins mauvaise qu’attendue ou baisser drastiquement suite à une bonne nouvelle moins bonne qu’attendue.
Partir du principe que vous allez garder vos titres jusqu’à ce que les fondamentaux vous donnent tord est usuellement une meilleure approche que de vous demander constamment si vous devez vendre vos titres sous prétexte que ceux-ci sont « trop montés » (en bourse « trop monté » étant très relatif).
6/ « Sell in May and go away »
Il y a une réalité statistique vérifiée derrière cette citation boursière : la période allant de mai à septembre est historiquement bel et bien la plus faible de l’année.
Ce que le proverbe ne dit pas en revanche, c’est que les rendements de toutes les périodes de temps à 6 mois sont positifs.
Si vous avez un horizon d’investissement à long terme : vendre en mai a donc statistiquement plus de chances de vous faire perdre de l’argent que de vous en faire gagner (voyez plutôt dans le tableau suivant) :
Essayer de sortir et de rentrer constamment des marchés vous fera rentrer dans le jeu (usuellement perdant) du timing de marché, et entrainera de nombreux coûts inutiles qui viendront dégrader vos performances (les frais de courtage entre autres).
Une meilleure manière de procéder est d’utiliser les périodes de faiblesse (saisonnières ou non) pour renforcer les positions que vous détenez déjà sur des sociétés solides (ou pour en ouvrir de nouvelles si les valorisations chutent à des niveaux intéressants).
Conclusion
J’espère que vous aurez trouvé des choses utiles dans cet article.
Il y a souvent une forme de vérité derrière chaque proverbe boursier, mais la complexité naturelle des marchés fait qu’une stratégie gagnante peut difficilement être résumée en quelques maximes qui fonctionneraient 100% du temps.
Ils sont toujours utiles à connaitre pour approfondir sa culture boursière (et si vous aimez les citations, n’hésitez pas à compléter la lecture de cet article par les « 25 meilleures citations de Warren Buffett« ).
Cependant, poser les bases d’une stratégie solide n’est malheureusement pas toujours aussi simple que certains d’entre eux ne peuvent le laisser supposer.
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