Dans le monde de l’investissement les chutes boursières sont souvent des évènements redoutés, et même pour un investisseur chevronné, voir la valeur de son portefeuille chuter de 5%, 10%, ou 15% en l’espace de quelques jours peut souvent être une expérience stressante.
Au cours de la dernière semaine, l’indice américain S&P 500 a effacé pratiquement 3 mois de gains en l’espace de deux séances ce qui (au premier abord) peut sembler frustrant :
Dans l’article de cette semaine (et pour contrebalancer quelque peu ce sentiment de frustration), j’aimerais donc revenir sur les bénéfices (cachés) de ce genre d’événements, et expliquer un peu plus en détails pourquoi, si vous êtes un investisseur de long terme désireux de générer un maximum de rendement en bourse, vous devriez les attendre avec impatience plutôt que les redouter.
Ce que nous verrons (entre autres) :
- L’erreur faite par la plupart des investisseurs qui voient le cours de leurs actions chuter
- Pourquoi les déclins de marchés sont synonymes d’opportunité
- L’élément central qui conditionnera la majorité de vos rendements boursiers à long terme
Payer moins cher pour la même chose
Un célèbre investisseur a dit que les marchés financiers sont par nature irrationnels, car les bourses sont les seuls endroits au monde où les gens s’enfuient pendant les soldes.
Et si ce phénomène se reproduit encore et encore, c’est parce que la plupart des gens ont tendance à confondre la valeur de leur société avec le prix qu’ils la paient en bourse.
Warren Buffett (ainsi que son mentor Benjamin Graham) sont les deux investisseurs les plus souvent cités pour avoir établi la nette distinction qui existait entre les deux à travers leur célèbre aphorisme « Price is what you pay, value is what you get » (le prix c’est ce que vous payez, la valeur c’est ce que vous obtenez).
La première fois que j’ai lu cette citation, j’ai eu du mal à en saisir le sens et les implications et à comprendre pourquoi tout le monde semblait trouver cela si profond.
En réalité, cette simple phrase rétabli la différence (simple mais essentielle) qui existe entre le prix que côte une action en bourse, et la valeur fondamentale de la société.
Si le prix d’une société chute fortement alors que se valeur fondamentale reste inchangée, cela signifie simplement que l’on a une bonne occasion de payer moins cher pour exactement la même chose, et donc qu’il n’y a pas de raison de paniquer puisque le marché nous donne simplement l’occasion de…
Toucher plus de dividendes (pour le même prix)
Le corollaire de payer moins cher une société, c’est que si celle-ci paie 4 euros de dividendes et que son prix passe de 100 à 50 euros, nous pouvons toucher 2 fois plus de dividendes sur une même somme d’argent investie.
Le rendement de l’action passe alors de 4% à 8%, et le placement n’en devient que plus intéressant (du moment que vous avez fait vos devoirs auparavant bien sûr, et que vous vous êtes assuré que le dividende de la société était sûr, car il ne faut jamais oublier que le dividende d’une société dont les finances ne sont pas saines peut être coupé).
Toucher des dividendes réguliers constitue un avantage psychologique certain dont disposent les investisseurs qui optent pour une stratégie de rendement plutôt qu’une stratégie de croissance durant les corrections de marché : si vos actions Facebook ou Amazon (qui ne paient pas de dividendes) chutent de 50% : il ne vous reste que l’espoir d’un rebond futur auquel vous raccrocher pour ne pas vendre vos titres.
Si une action comme disons Royal Dutch Shell chute de 50%, il reste un dividende très concret de 8% versé à intervalle régulier sur votre compte en banque, ce qui vous donne une très bonne raison de ne pas vendre. Il a de plus été prouvé que les actions qui versent des dividendes ont tendance à être plus stables et moins volatiles que les autres, les périodes de déclin constituent donc l’occasion parfaite pour en acheter à bon compte.
Cependant, toucher plus de dividendes n’est pas le seul avantage qu’il y a a acheter suite à une chute de marché.
Des rendements futurs supérieurs
Dans le paragraphe précédent, j’expliquais que plus le prix d’une action chute, plus son rendement augmente, puisque nous payons simplement moins cher pour la même chose.
Dans ce paragraphe, nous allons voir pourquoi payer vos titres le moins cher possible est critique pour vos rendements à long terme (ce qui expliquera aussi par la même occasion pourquoi personnellement je ne me contente pas de simplement investir dans des trackers, et que j’achète mes actions en utilisant un minimum de filtres que ce soit en terme de timing ou de qualité).
Voici un graphique du rendement de Coca-Cola (un « dividend aristocrat » bien connu) à travers les décennies :
Comme vous pouvez le voir ici, le titre n’a pas toujours payé les 3% de dividendes qu’on lui connait aujourd’hui, et au cours des 50 dernières années le rendement du titre a oscillé entre des plus bas autour des 1% (quand le marché était haut) et des plus hauts autour des 8% (quand le marché était très bas au début des années 1980).
Voici maintenant un tableau présentant les rendements totaux (en terme de prix + dividendes perçus) que vous auriez obtenu en fonction du rendement (en terme de dividendes versés) au moment de l’achat sur les 10 années suivantes :
Comme vous pouvez le voir, il y a une relation directe entre le rendement du titre à l’achat et les rendements totaux sur le long terme. Vous pouvez constater ici que si vous achetiez le titre au moment où il payait entre 0 et 2% de dividendes, vous étiez loin d’avoir les retours fantastiques d’un investisseur qui l’aurait acheté à un moment où le titre payait un rendement plus intéressant.
C’est pour cela qu’il est inutile d’acheter une action sur le seul critère que c’est un titre que Warren Buffett détient (par exemple). Si vous ne savez pas quel prix il a payé pour l’action, vous risquez d’obtenir des rendements à long terme très différents des siens sur votre position.
(N.B : C’est aussi la raison pour laquelle le fait que je vous donne le contenu de mon portefeuille boursier aujourd’hui ne vous sera sans doute pas très utile si vous ne savez pas exactement à quel prix j’ai acheté chaque titre et pourquoi).
Voici un autre exemple avec la société Johnson and Johnson (que j’ai déjà présenté sur le site auparavant) :
Comme vous pouvez le voir il existe une relation directe entre les rendements initiaux (et donc le prix payé) et les rendements totaux que vous aurez sur les 10 années suivantes.
Et comme les chutes de marché poussent les prix à la baisse et les rendements à la hausse : vous savez ce qu’il vous reste à faire si vous souhaitez booster les performances de votre portefeuille.
Nuances importantes à apporter
Comme je l’ai déjà expliqué auparavant, rien n’est simple en bourse et cela ne veut pas dire pour autant que vous devez simplement vous orienter sur les titres qui paient les plus hauts rendements du marché pour avoir des retours à long terme très intéressants (en fait j’ai déjà expliqué dans mon article sur les actions à haut rendement pourquoi cette stratégie vous conduirait surement vers de mauvaises performances).
Cela ne veut pas dire non plus que vous devez attendre des rendements futurs de 32% et 20% par an respectivement par an si vous achetez J&J et Coca dans une période où ils vous paient 3% ou plus (car comme vous le savez dans doute les performances passées ne préjugent pas des performances futures, et il existe d’autres méthodes (plus complexes) pour estimer les rendements futurs attendus d’une société).
Cela veut simplement dire que :
- Si vous achetez de mauvaises sociétés, vous aurez des rendements décevants
- Si vous achetez de bonnes sociétés, mais trop cher, vous aurez aussi des rendements décevants
Acheter de la qualité au bon prix est le secret d’une stratégie d’investissement gagnante sur le long terme, et les périodes de chute de marché sont justement de parfaits moments pour se tenir à l’affut des bonnes opportunités.
Conclusion
J’espère que cet article vous aura aidé à y voir un peu plus clair sur la question des chutes de marché, et sur pourquoi vous devriez les attendre plutôt que les craindre si vous êtes un investisseur qui a une vision de long terme.
Ces périodes (souvent tant redoutées) constituent en fait les meilleurs moments pour acheter, et vous permettront à la fois d’avoir plus de titres, plus de dividendes, et plus de rendements totaux (si vous achetez les bonnes sociétés au bon prix).
Fabrice says
En avant les soldes!
Merci pour ces articles motivants chaque semaine, ça aide beaucoup pour garder le moral pendant les phases bear, ou le sens général n’appairait pas vraiment positif…
Buffett a tellement raison, c’est tellement mieux d’acheter des actifs en soldes. Mais nous en sommes peu être qu’a la première démarque?
Pierre says
Bonjour Fabrice (et merci pour ce retour positif),
Effectivement, c’est toujours difficile à dire au début d’un mouvement (c’est pour cela que quelle que soit la période en bourse il n’est jamais facile d’acheter : haut on a l’impression que c’est trop cher, bas on a la sensation que la chute peut se poursuivre).
Ceci dit il faut garder à l’esprit qu’acheter les replis de -10%, -20%, -30%(même sans avoir un timing parfait) met historiquement les chances d’obtenir des rendements à long terme supérieurs de notre coté.
Egalement, l’analyse technique peut aider pour ce qui est de juger de la psychologie de marché à l’instant T (et éventuellement ajuster ses achats en conséquence) ;
Cdt
Youngstocker says
Il y a un autre de vos articles que j’aime bien relire durant les phases de déprime boursières:
https://plus-riche.com/correction-boursiere
Je trouve qu’il résume assez bien ce qu’il faut faire et ce qu’il ne faut pas faire. À encadrer !
Pierre says
Effectivement, ces deux articles sont très complémentaires ; merci de l’avoir posté 😉