La question d’investir en fonds ou en actions (et quelle est la meilleure option entre les deux) m’est souvent posée, et beaucoup de gens souhaiteraient avoir une meilleure vision des avantages et des inconvénients propres à ces deux approches.
En règle générale il y a de fervents partisans des 2 camps (c’est à dire des gens qui vous diront que les fonds sont la seule manière d’investir en 2020), et d’autres qui vous diront que vous ne gagnerez que très peu d’argent en bourse si vous ne passez pas par le biais d’actions individuelles.
Dans cet article, nous allons proposer une approche plus nuancée en présentant de manière détaillée les avantages et inconvénients de ces 2 approches (je donnerai également l’exemple d’un portefeuille d’actions « individuelles » que j’avais présenté sur le site en mars).
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Investir en fonds indiciels (trackers, etfs, etc)
Pour rappel, investir dans un fonds indiciel (ou tracker) revient à acheter un produit de bourse « low cost » qui répliquera un indice boursier ou un panier d’actions à votre place. C’est une approche extrêmement passive qui est aussi extrêmement populaire aujourd’hui. Tout de suite, un retour sur les avantages et inconvénients de cette stratégie.
(P.S : Si vous voulez en savoir un peu plus sur cette approche, je vous invite à lire ou relire mon article « investir en bourse simplement avec les trackers« ).
Les principaux avantages des fonds indiciels (et trackers) :
1/ Simplicité : pas besoin d’étudier chaque action individuellement. Comme le disait John Bogle : plutôt que d’essayer de trouver les aiguilles dans la botte de foin, ici vous achetez simplement la botte de foin.
2/ Gain de temps : cette idée « d’acheter la botte de foin » plutôt que de chercher des pépites, ou d’effectuer une sélection plus affinée vous garanti un gain de temps maximum.
3/ Diversification maximale : en un seul clic, vous êtes déjà diversifié sur des dizaines ou des centaines de sociétés en achetant un fonds indiciel, ce qui réduit votre « risque société » (le risque de vous tromper sur une action), à quasiment zéro.
4/ Performances supérieures à la moyenne : la plupart des fonds passifs et trackers low cost ont fait mieux que la majorité des gérants de hedge funds au cours des dernières décennies (leurs faibles frais sont un solide argument qui leur donne une longueur d’avance sur des fonds qui vous factureraient 1 à 2% annuellement).
Les principaux inconvénients des fonds indiciels (et trackers) :
1/ Présence de frais : si au cours de ces dernières années, les frais de beaucoup de fonds ont été réduits au minimum : il y a toujours des frais à payer ici, alors que détenir des actions « en direct » est gratuit (0 frais de gestion).
2/ Impossibilité d’être sélectif : le problème d’une approche de type « achat de gros« , c’est que vous achetez le bon avec le mauvais (sans distinction). Vous aurez donc dans le lot de très bons titres, mais aussi de très mauvais (que vous n’auriez pas forcement acheté avec une sélection plus fine).
3/ Pas optimisés pour le rendement : la plupart des trackers sont optimisés pour répliquer au mieux un indice boursier de référence. C’est à dire qu’ils ne sont pas optimisés pour verser des dividendes optimaux, ni pour éviter les sociétés qui n’en distribuent pas (à titre d’exemple : 1 action sur 5 de l’indice S&P 500 ne paie pas de dividende).
4/ Offre pléthorique (semi-simplicité) : ce point-ci commence à nuire quelque peu à la simplicité initiale de ces produits, mais l’explosion de l’offre de ces dernières années fait qu’il y a désormais des centaines de trackers sur des centaines d’instruments différents (et les débutants en bourse se sentent parfois un peu perdus).
5/ Diversification internationale difficile (régulation) : ce problème est également nouveau, mais les nouvelles règles européennes font que la majorité des trackers et fonds américains ont été interdits à l’achat pour les investisseurs européens si leurs prospectus ne sont pas traduits en français (protectionnisme, quand tu nous tiens). C’est une barrière supplémentaire pour ceux qui souhaitent investir à l’étranger simplement aujourd’hui.
Conclusion
Comme vous le voyez, les trackers sont loin d’être des instruments « parfaits » (même si ils nous sont souvent présentés comme tels), et les soucis de régulation de ces dernières années n’ont rien arrangé sur ce point.
Pour résumer : les fonds sont de bons instruments si vous êtes pressé, si ne souhaitez pas vous intéresser trop en profondeur à la bourse, si les dividendes ne sont pas votre priorité, et idéalement si vous souhaitez vous en tenir principalement à des investissement « locaux » (du fait de la régulation ennuyeuse sur les fonds étrangers).
Investir en actions individuelles (locales ou étrangères)
L’autre option (plutôt que de déléguer entièrement la gestion de vos économies à un gérant, ou de les placer sur un indice boursier), c’est d’être un peu plus sélectif, de reprendre les choses en main et de gérer vous même votre portefeuille d’actions.
C’est une approche qui peut délivrer des bénéfices supérieurs (si bien exécutée), et des pertes désastreuses (si mal exécutée). Beaucoup la considèrent donc comme plus risquée que l’option des fonds « passifs » (encore une fois : toute la différence se fait ici dans la qualité de l’exécution).
Les principaux avantages des actions individuelles :
1/ Investissement « à la carte » : ici vous n’achetez plus un panier d’actions « pré-diversifié » sur lequel vous n’avez pas le contrôle, vous êtes donc libre de laisser les « brebis galeuses » de coté et d’investir à la carte dans les sociétés que vous souhaitez.
2/ Possibilité d’optimiser pour le rendement : investir à la carte veut dire que vous pouvez aussi choisir d’éviter les sociétés qui ne paient rien (par exemple), ou qui paient de faibles rendements si votre but est de dégager une rente régulière avec la bourse.
3/ Performances supérieures possibles (si vous êtes bon) : le fait de s’éloigner de la simple réplication d’un indice boursier fait que vous pouvez obtenir des performances supérieures (nous allons donner un exemple concret en fin d’article). Bien entendu c’est ici à double tranchant.
4/ Zéro frais de gestion : vous gérez vous même donc il y a 0 droits de garde ou frais de gestion à payer (seulement les frais de courtage qui peuvent être minimisés via un courtier low cost).
5/ Diversification internationale simple et accessible (moins régulé) : là où les régulateurs ont récemment décidé que les investisseurs français étaient apparemment trop bêtes pour investir dans des fonds dont la notice n’était pas traduite en français : personne ne peut vous empêcher d’acheter des actions américaines (par exemple).
Les principaux inconvénients des actions individuelles :
1/ Nécessite un plus haut niveau d’expertise : Investir dans des actions individuelles veut dire que vous devrez vous pencher plus avant sur les résultats, la qualité et la valorisation de chaque société dans laquelle vous envisagez d’investir (et que vous devrez acquérir l’expertise vous permettant de différencier les bons titres des mauvais).
2/ Plus chronophage (dépend de la stratégie) : Prendre le temps de trouver de bons titres est nécessairement un peu plus chronophage que de simplement acheter un fonds. Cela ne prend pas non plus des heures si vous avez les bonnes méthodes, mais l’investissement temporel est certainement plus important.
3/ Performances inférieures possibles (si vous vous trompez) : Là où investir dans un fonds indiciel diversifié vous donnera automatiquement une performance proche de celles des indices boursiers (à quelques % près en fonction des frais et du fonds choisi) : acheter de mauvaises actions peut vous conduire à une sous performance massive.
4/ Plus de chances de faire de mauvais choix : Si vous essayez d’acheter des actions « un peu au hasard », vous avez statistiquement plus de chances de vous tromper que de tomber bon (car l’essentiel des performances des bourses est généré par une minorité d’actions). Il faut donc être sûr de savoir ce que vous faites.
Malgré ces risques (bien réels), le jeu des actions « en direct » peut en valoir la chandelle (comme nous allons le voir dans le point suivant).
Les atouts des actions « en direct » en 2020 (+15%)
Maintenant que nous avons fait un tour d’horizon des avantages et inconvénients de chaque option, voyons ensemble une illustration « en temps réel » sur 2020 de ce que peut offrir une approche en actions « en direct » bien exécutée par rapport à un fonds indiciel classique.
Les périodes de crise favorisent le « stock picking »
Il me semble particulièrement à propos ici d’utiliser l’exemple de cette année 2020, car la crise que nous avons vécu a particulièrement touché certains secteurs et a largement bénéficié à d’autres (l’e-commerce par exemple), ce qui fait de ce contexte économique difficile un bon environnement pour les « stock pickers ».
C’est le genre de situation qui (sans être un génie de la bourse faisant de folles anticipations et prenant des paris risqués sur l’avenir) peut permettre de mieux positionner ses investissements (simplement avec du sens commun, et une bonne connaissance de comment marche la bourse).
Performances du portefeuille « anti-covid » depuis début 2020 (15 valeurs)
Pour cet exemple, je vais reprendre la liste que j’avais donné dans mon article « Coronavirus : quelles actions acheter? (15 valeurs défensives) » d’il y a quelques mois. Dans cet article, j’avais présenté 15 valeurs défensives mieux équipées que les autres pour traverser la crise actuelle.
(Notez que cet article a été publié après que la crise du covid ne se soit déclarée, je n’ai donc rien anticipé ici et je n’ai absolument pas vu venir cet évènement : j’ai simplement posté cette liste une fois que la crise était là. Il s’agit donc ici d’une approche 100% réactive, et non prédictive).
J’ai donc pris les performances d’un portefeuille composé de ces 15 valeurs que j’ai comparé à l’indice boursier S&P 500 (les résultats que vous auriez eu avec un fonds indiciel « classique ») en 2020. Voici ce que cela donne :
Et ci-dessous les performances détaillées du portefeuille 15 valeurs (ici le « portfolio 1« ) :
Comme vous pouvez le voir, une sélection de titres un peu plus fine permettait de mieux positionner son portefeuille par rapport aux évènements actuels qu’un portefeuille indiciel prenant le bon avec le mauvais.
Et l’écart de performance est significatif puisque le portefeuille « anti-covid » a généré des retours supérieurs de 15% au portefeuille indiciel « passif » sur les 6 premiers mois de 2020. Le tout avec une volatilité inférieure à celle de l’indice S&P 500 sur la même période.
Performance du portefeuille anti-covid depuis Mars 2020
Pour montrer que je n’ai pas pris ici la période de test qui m’arrange le mieux (une pratique commune dans le monde de la bourse qu’on appelle aussi le « curve fitting« ), j’ai aussi réalisé le même test depuis Mars (date de publication officielle de l’article sur le site) :
Comme vous pouvez le voir l’essentiel de la surperformance (+10% environ) est bien générée après la crise (ce qui laissait à un investisseur le temps de se positionner sans nécessairement avoir à faire de prévisions boursières farfelues ni avoir anticipé les évènements actuels).
On retrouve également des performances supérieures associées à une volatilité (Stdev) deux fois inférieure à celle d’un fonds indiciel diversifié sur la même période.
Conclusion
J’espère avoir pu vous dresser ici un panorama exhaustif des avantages et des inconvénients de chaque approche. On me demande souvent quels trackers ou ETFs je détiens personnellement : je n’en détiens pas actuellement puisque j’investis exclusivement en actions « en direct ».
Je voulais montrer à travers cet article que générer de la surperformance n’est pas non plus impossible avec quelques connaissances boursières et une bonne dose de sens commun (cela a toujours été la thèse de l’investisseur Peter Lynch, une des rares légendes de la bourse qui ne se contentait pas de conseiller aux particuliers de « simplement acheter un fonds« ).
Acheter un fonds peut être une bonne stratégie pour vous si le profil avantages/inconvénients présenté dans cet article vous convient. Cela ne veut pas dire cependant que cette stratégie est la meilleure « dans l’absolu », ni qu’elle est la mieux adaptée pour tout le monde.
Fabrice says
Merci pour cette analyse, elle permet d’avoir les idées claires.
Différencier les ETF, trackers et fonds gérés par une société d’investissement pourrait être pertinent. Si bien je suis continuellement investi en actions en direct sur 2 à 5 sociétés, ce sont des entreprises en France ou Europe car les informations sont facilement disponibles. Ce n’est pas le cas pour la chine ou d’autres marchés, et je préfère alors investir via des fonds (avec capitalisation des dividendes, je ne sais pas si les ETF capitalisent) en faisant confiance à plusieurs gérants, il y en a pléthore et pour tous les marchés ou diversification, plutôt qu’en direct. Les trackers sont intérèssants si on a des convictions sur les tendances des marchés (pas trop mon cas), incapable d’anticiper un pull ou un bear.
Pierre says
Bonjour Fabrice,
En effet, ces produits peuvent être particulièrement intéressants pour gagner en exposition sur des marchés plus marginaux (tels que l’Asie ou les marchés émergents). Le problème c’est que la régulation des fonds de produits étrangers est de plus en plus ennuyeuse pour les investisseurs européens, aussi faut-il trouver des fonds de bonne qualité qui sont encore autorisés chez nos courtiers respectifs (ce qui n’est pas toujours évident) ;
Bien Cordialement
Fabrice says
Bonjour, je suis par exemple investi sur carmignac emergent (aucune intention de faire de la promotion, car c’est juste un fond facilement accessible en assurance vie) et qui s’est bien porté depuis 1 an. J’y vois une diversification sans effort et sans besoin d’ avoir des compétences particulières pour sélectionner des actions dans ces pays lointains / émergents.
Est-ce plus pertinent d’investir dans un tel fond que dans un ETF émergent?
Cordialement