Que ce soit dans mon proche entourage ou sur internet, on me pose souvent une question en apparence simple mais à la réponse complexe : « Comment savoir où placer son argent? » (sous entendu pour gagner un maximum, et de préférence à coup sur).
La réponse étant variable en fonction de la période à laquelle vous lirez cet article (tout comme la réponse est variable à chaque fois que l’on me pose la question), et savoir où placer son argent étant une compétence utile en toutes circonstances, j’aimerais discuter ici en détail des bases à connaitre et des critères à considérer pour prendre une décision d’investissement intelligente.
Dans la première partie nous détaillerons les principaux véhicules d’investissement accessibles aux particuliers, et dans la seconde partie nous parlerons des facteurs macroéconomiques à considérer pour savoir où placer son argent intelligemment.
Où placer son argent : Les véhicules disponibles
Si vous mettez d’emblée de coté les véhicules d’investissement douteux (c’est à dire peu fiables, douteux ou très spéculatifs, cela inclut les options binaires, le forex, les cryptodevises, et à peu prêt toutes les annonces publicitaires que vous pouvez recevoir dans votre boite mail pour des « investissements miracles »), il vous reste 4 véhicules d’investissement robustes, liquides, accessibles et existants depuis des siècles :
Les actions : C’est la classe d’actif qui à offert historiquement les meilleurs rendements. Ceci vient au prix d’une forte volatilité, c’est à dire qu’il faut avoir l’estomac solide pour faire face aux fluctuations parfois violentes de la valeur de vos titres (ou avoir une bonne stratégie). Cela dit si vous pouvez les tolérer vous serez récompensé par de gros rendements.
Les obligations : Un investissement plus « tranquille » au niveau de la volatilité. Et très rentable depuis les années 1980 à cause de la chute continue des taux (lorsque les taux baissent, les prix des obligations augmentent, et donc la valeur de votre portefeuille augmente, mais nous verrons tout cela dans le second point). Problème : les taux sont actuellement extrêmement bas et les rendement sont donc assez mauvais à ce jour. Pour rappel les obligations sont des titres de dette émis par une société. Si vous achetez une obligation, votre capital est remboursé à l’échéance et vous percevez chaque année un taux d’intérêt distribué sous la forme d’un coupon (le risque étant de choisir une société qui fasse faillite avant l’échéance et ne puisse donc pas vous rembourser, ce qui est rare si vous prenez de grosses entreprises connues et solides).
Les matières premières : Cette classe d’actif inclut tous les actifs tangibles qui sont, et bien comme leur nom l’indique, des matières premières. C’est à dire entre autres les métaux précieux, le pétrole, les céréales, mais aussi des choses plus exotiques comme le bétail vivant (ou mort), ou le jus d’orange congelé. Vous vous en doutez, chaque sous-marché répond à des conditions d’offre et demande qui lui sont propres, cela dit la classe d’actif « matières premières » réagit généralement dans sa globalité à certaines forces macro économiques (détaillées dans le point suivant).
L’immobilier : L’immobilier est une classe d’actifs tangibles également. Cependant le marché immobilier n’est pas un marché centralisé, c’est à dire qu’il existe une grande quantité de « sous marchés » locaux, et qu’il n’y a pas de cotation électronique globale de la classe d’actif « immobilier » (même si certains fonds proposent de l’immobilier « papier » qui vient répliquer le cours du physique). Quoiqu’il en soit vous comprendrez bien que l’environnement ne sera pas du tout le même pour un particulier qui veut investir à Paris, que pour un particulier qui habite dans un village de province.
Il y aurait hypothétiquement une cinquième classe d’actifs que je ne liste pas : le cash. Ceci inclut le cash conservé sur un compte à terme ou un compte de type Livret à faible rendement.
Si les conditions économiques sont désastreuses, cette catégorie peut parfois s’avérer être la meilleure option (mais c’est très rare et cela ne dure pas en règle générale, il y a toujours une opportunité quelque part). Ce qui nous emmène aux point suivant.
Les conditions économiques, et leur impact sur chaque classe d’actifs
Chacun des véhicules évoqués précédemment connait des périodes qui lui sont favorables, et des périodes qui lui sont défavorables , c’est pourquoi on conseille généralement de construire un portefeuille équilibré réparti sur plusieurs actifs, afin de profiter des avantages de la diversification.
Cela signifie également, entre autres, que vous pourrez être le meilleur investisseur actions du monde par exemple, vous ne ferez pas d’argent si vous investissez dans une période ou les conditions générales (macroéconomiques) sont fortement contre vous.
La bonne nouvelle, c’est que l’économie est cyclique et que chaque phase du cycle à tendance à favoriser une classe d’actifs en particulier, il y a donc 90% du temps, « toujours une opportunité quelque part ». Voyons en détails les principales conditions macroéconomiques à prendre en compte, il y en a 4 dont il est important de comprendre les mécanismes.
La croissance : Ah la fameuse croissance. Celle que tout le monde recherche avidement. En période de croissance tout va généralement bien pour tout le monde. L’économie se porte bien, les consommateurs consomment, les entreprises font de bons résultats et les actions montent. La croissance est positive pour toutes les classes d’actifs, et favorise généralement en particulier les actions. L’immobilier se porte bien également en général car les gens ont de l’argent pour payer les loyers (ou pour devenir propriétaires).
La récession : Là c’est le contraire (forcement) tout va mal. Si vous détenez des actions du début à la fin d’une récession, vous vous retrouvez en général avec des pertes en capital importantes. Cependant les fins de récessions marquent souvent des opportunités majeures pour l’investisseur avisé (2008 par exemple). Pendant une récession, les actions et l’immobilier se portent mal en général. Les solutions à privilégier sont défensives, c’est à dire les obligations d’état (ou de sociétés extrêmement solides), ou le cash.
L’inflation : Ici cela devient plus compliqué. L’inflation est par définition un phénomène monétaire qui se traduit par une hausse générale des prix. C’est à dire qu’un billet de 100 euros vous permettra d’acheter moins demain qu’aujourd’hui. Vous comprendrez donc que le cash est fortement déconseillé durant ces périodes. Au contraire les actifs tangibles de type immobilier et matières premières ont tendance à très bien se porter durant ces périodes (puisqu’il y a une hausse des prix généralisée). Les obligations à taux fixe sont généralement à déconseiller durant ces périodes (votre coupon étant fixe et les prix des actifs tangibles ne faisant que monter, vous perdez mécaniquement sans cesse du pouvoir d’achat).
La déflation : C’est le phénomène inverse (et c’est mauvais pour l’économie). Votre billet de 100 euros vous permettra d’acheter plus demain qu’aujourd’hui : il y a une pression baissière sur le niveau général des prix. Vous l’aurez deviné, les matières premières et l’immobilier font de mauvaises performances durant ces périodes, puisque les prix des actifs tangibles baissent (et les loyers également, car ils sont indexés sur l’inflation). Les classes d’actifs à privilégier dans ce cas de figure sont le cash (puisque vous achetez plus demain qu’aujourd’hui avec, votre pouvoir d’achat augmente mécaniquement en conservant votre cash), ainsi que les obligations à taux fixe (le coupon reçu vous permet de consommer de plus en plus du fait de la baisse des prix générale alors que le montant du coupon lui ne baisse pas).
Pour conclure sur du concret : les matières premières telles que l’or et les métaux précieux ont eu une performance très mauvaise ces dernières années du fait des pressions inflationnistes quasiment nulles, et pour cette même raison les obligations ont fait une bonne performance (pas en terme de rendement mais en termes de hausse des prix).
Les actions également ont fait de bonnes performances, surtout aux États-Unis, du fait de la reprise économique (et des politiques de la banque centrale).
Comme vous pouvez le voir, il n’y a pas de mystère, et les rendements de vos investissements s’expliquent en grande partie par les conditions économiques (et les politiques des banques centrales également en ce moment).
Maintenant que vous avez une meilleure vision des facteurs économiques, nous allons passer à l’étape suivante.
Concrètement, comment savoir où placer son argent?
Disons que maintenant vous savez à peu prêt quelles sont les conditions économiques générales, mais que vous hésitez encore entre plusieurs placements. Ou alors vous n’êtes pas sur de la direction de l’économie, nous sommes à un croisement de cycle et l’avenir s’annonce peu clair. Comment savoir ou investir?
C’est simple : comparez les rendements de chacune des grandes classes d’actif entre elles, et ensuite allez au plus rentable (et au moins risqué). Je vais vous donner un exemple : aujourd’hui les obligations se paient très cheres et offrent des rendements très faibles. Vous aurez par exemple 1% de rendement sur des obligations d’état très sures. Un PEL dans une banque rapporte actuellement 1.5% avec un risque zéro ou presque (le mien rapporte 2.5% car ouvert il y a deux ans). Vous comprendrez très vite que je n’ai pas intérêt à investir dans les obligations.
Observons ensuite les matières premières. Tout d’abord elles ne paient pas de rendement (ce qui par nature ne ne me plait pas beaucoup), mais en plus de cela il n’y a peu ou pas d’inflation en Europe pour mettre une pression haussière sur les prix, et leurs cours sont très volatils. Le rapport risque/rendement ne joue pas en faveur de cette classe d’actifs en ce moment, je la laisse donc de coté.
Il me reste donc les actions et l’immobilier. Nous allons arbitrer entre les deux de manière simple en nous posant les questions suivantes : est-ce que le marché actions se paie cher actuellement? (c’est à dire, les cours sont ils élevés et le rendement faible?). Est-ce que mon marché immobilier local offre des rendements élevés?
Supposons que je puisse trouver beaucoup d’actions en bourse qui se paient peu cher et me rapportent 6 ou 7% de rendement. Et que mon marché immobilier local ait une rentabilité moyenne de 3%, avec un prix du mètre carré très élevé. Naturellement, je vais m’orienter vers la bourse. Si à l’inverse je peux trouver très facilement des rendements de 6 a 7% en achetant un studio dans mon quartier, je n’ai aucun intérêt à payer trop cher des actions risquées qui vont me rapporter 2 ou 3% de rendement.
Vous comprendrez donc qu’il est assez facile de savoir ou se positionner simplement en observant les conditions économiques générales, et en y appliquant un peu de bon sens. Pas besoin de faire des prédictions compliquées à 10 ou 20 ans, ou d’avoir un doctorat en économie, car de toutes façons personne ne peut prévoir l’avenir (et vous n’en avez pas besoin pour être un bon investisseur).
Portez un regard juste et objectif sur le monde qui vous entoure, et demandez vous où sont les opportunités. Une fois que vous les aurez repérées, ne vous perdez pas en abstractions et agissez. Restez dans le présent et ne faites pas de conjectures. C’est tout ce dont vous aurez besoin pour être un bon investisseur.
(N.B. : Si cet article vous a intéressé, je vous propose 3 articles pour aller plus loin :
- Une stratégie d’investissement utilisant ces principes économique pour gagner 9% par an simplement
- Un comparatif de toutes les classes d’actifs déterminant le meilleur investissement à long terme
- Une application concrètes de cette grille d’analyse à la situation actuelle pour savoir où investir en 2017)
Salut Pierre
Comme promis, je passe par ton blog rapidement (il est 1h23 du matin, j’essaie de trouver le sommeil… pff tes articles sont trop intéressants pour cela ;-)).
J’aime bien comment tu réponds de manière « macro » à cette question, comment et où placer son argent, tu m’as expliqué des concepts que je connaissais déjà mais que je ne parvenais pas forcément à relier entre eux!
Intéressant en tout cas, merci beaucoup
Salut! Merci pour ton commentaire, j’ai une formation d’économiste à la base mais comme toi lorsque j’étais en cours, j’avais parfois du mal à relier les grands concepts macro (inflation, déflation et cie) à une application plus « pratique » de la chose (du genre : c’est bien beau, mais comment on fait pour gagner de l’argent avec ça? :-P). Du coup je me suis dis que ce genre d’article pouvait servir. Je pense que mieux comprendre les forces macroéconomiques qui poussent les différentes classes d’actifs peut aider à avoir une plus grande confiance dans ses investissements.
Salut Pierre
Oui ce genre d’article peut servir, ton blog entier est très utile et intéressant de toute manière. Je suis maintenant abonné et j’ai lu quelques-uns de tes derniers articles, je compte bien les partager rapidement 😉
Bonne continuation et bravo encore une fois pour des articles de haute qualité.
Nicolas.
Wow, merci ça fait plaisir à lire! Et merci pour les partages! 😉
Bonjour Pierre,
Comme toujours les 2 meilleurs véhicules d’investissement, et ce depuis des années, sont la bourse et l’immobilier. Et plus encore aujourd’hui dans un monde ou les rendements des livrets classiques et autres assurances vie se réduisent comme peau de chagrin et se font petit à petit grignoter par l’inflation. J’ai beau répéter ça au personnes de mon entourage qui souhaitent placer leurs économies ils ne semblent pas très convaincus ( surtout concernant la bourse qui a mauvaise image en France).
Concernant le PEL je me demande si le fait d’en posséder un peut jouer en sa faveur. Notamment pour obtenir un prêt immobilier à « taux privilégié » auprès de sa banque dans le cas d’un investissement locatif par exemple. A-t’il joué un quelconque rôle lors de tes investissements ou bien est-ce tu l’utilise juste comme un compte d’épargne à moyen terme ?
Egalement, pour un investisseur boursier qui investit dans des sociétés de qualité et qui possède un compte titre ne vaut-il pas mieux basculer également son épargne de précaution ( et de moyen terme aussi) sur un compte de ce type étant donné qu’il offre une grande flexibilité pour profiter encore plus des rendements générés par la bourse tout en ayant la possibilité de retirer son argent à tout moment en cas de coup dur ( en vendant une partie de ses actions ) plutôt que de la laisser dormir sur un livret A qui ne rapporte rien ?
Merci d’avance,
Yoann
Bonjour Yoann,
Alors concernant le PEL ce n’est pas actuellement une solution très avantageuse au niveau de l’emprunt sans le sens où on peut généralement avoir des taux d’emprunts inférieurs aux taux préférentiels du PEL en fonction de l’année à laquelle celui-ci a été contracté (dans mon cas par exemple le PEL n’a pas été un atout pour emprunter). Ceci est dû au fort mouvement de baisse des taux de ces dernières années.
En revanche un PEL contracté il y a quelques années peut rapporter du 2.5% ou du 3%, et si cela ne semblait pas mirobolant à l’époque, ce sont aujourd’hui des « taux sans risque » tout à fait décents (dans dans un contexte ou les obligations françaises et allemandes rapportent des rendements négatifs ou nuls). En cela les vieux PEL peuvent être de bons véhicules pour stocker une épargne de sécurité (du fait de la rémunération supérieure à beaucoup d’obligations d’états).
Concernant le fait de laisser son argent dormir sur un Livret A ou de le faire passer sur un compte titre pour avoir des liquidités « prêtes à servir » en cas de chute par exemple, il s’agit vraiment d’un arbitrage personnel. Le Livret A à l’avantage de rapporter un petit rendement sur l’argent liquide avec 0 risques, aussi beaucoup de gens préfèrent ce support à un compte titres (qui lui ne rémunère pas du tout les liquidités) pour déposer des liquidités en attente d’être investies ou dépensées ;
Cdt
Merci pour ton éclaircissement Pierre
Cdt
Avec la forte inflation, il faut dépenser son argent car il dévalue de jour en jour. Sinon, il faut investir dans des biens tangibles.