Depuis que j’ai lancé le site j’ai régulièrement l’occasion d’échanger avec les lecteurs, ce qui m’a permis d’avoir une meilleure vision des problèmes les plus fréquents rencontrés par les investisseurs débutants en bourse.
Certains sujets ont tendance à revenir de manière récurrente au cours de ces échanges, et j’ai donc pensé qu’il serait intéressant de faire ici un article sur les 5 erreurs les plus fréquentes qui font perdre de l’argent aux investisseurs (débutants et intermédiaires) sur les actions.
Ceci afin que vous puissiez vous même les éviter et que vous vous lanciez en bourse en ayant une longueur d’avance! C’est parti.
Table of Contents
1/ Chasser les hauts rendements
Chasser les actions à haut rendement est sans doute une des erreurs les plus courantes lorsque l’on démarre sur les marchés boursiers (et je reçois toujours régulièrement des mails ou des commentaires à ce sujet).
Qu’est-ce qu’une action à haut rendement ? Par définition, une action à haut rendement est un titre qui, dans les conditions de marché actuelles paie quelque part entre 6 et 10% de dividendes (là où l’indice boursier paie 2% pour les États-Unis et 3% pour l’Europe en moyenne).
Pourquoi les actions à haut rendement sont dangereuses? Comme expliqué précédemment : en bourse un dividende peut être coupé sans préavis si une société n’a pas les reins assez solides pour continuer de le payer (ce qui est le cas de la majorité des sociétés à haut ou très haut rendement). Un exemple ci-dessous avec l’action EDF :
Pour espérer opérer avec succès dans l’univers des actions à haut rendement, il est nécessaire d’avoir des compétences d’analyse fondamentale avancées afin d’identifier les pièges, et ce secteur particulier reste selon moi à réserver aux investisseurs chevronnés (et à une portion réduite de votre portefeuille).
C’est pourtant sur ce secteur dangereux que se lancent souvent la plupart des investisseurs débutants en espérant toucher de gros dividendes, et quelques mois plus tard, le prix de leur société se retrouve en chute libre, et leurs dividendes coupés (suite de l’exemple d’EDF juste en dessous).
Ce phénomène de hauts rendements « piégeux » est surnommé ironiquement par les américains le « zombie yield » (car si de loin la société à l’air vivante, elle est en fait déjà morte, et si vous vous en approchez trop près, vous vous ferez mordre).
Si vous débutez : orientez-vous plutôt vers des sociétés aux reins solides, et à moins de savoir calculer précisément les bénéfices anticipés d’une société, son ratio de couverture des paiements par le cashflow généré, et les probabilités de coupe sous 3 à 5 ans : évitez d’investir dans des actions à haut rendement.
2/ Chasser les tendances chaudes du moment
La seconde erreur la plus répandue en bourse, c’est de chasser les derniers secteurs « chauds » du moment, c’est-à-dire ceux qui font les gros titres et sur lesquels une croissance explosive est attendue (récemment : Tilray ou Beyond Meat par exemple).
Qu’est-ce que j’entends par « secteurs chauds »? Actuellement, tout ce qui s’approche de près ou de loin des biotechs, des « pot stocks », des cryptomonnaies, de l’intelligence artificielle, et de tout ce que les médias essaient de nous vendre comme les « valeurs de demain ». Cela peut sembler contre intuitif, mais nous allons voir plus en détails pourquoi dans la suite.
Pourquoi les secteurs chauds sont dangereux? La plupart du temps les titres de ces secteurs tradent à des valorisations élevées non pas sur leurs revenus actuels, mais sur l’espoir de revenus futurs. Cela fait que leur valorisation est gonflée d’optimisme (et de spéculation), et que lorsque la société décevra inévitablement les attentes (irréalistes) du marché, le retour à la réalité fera très mal. Observons quelques cas récents illustrant ce phénomène.
Quelques exemples d’actions « chaudes » déchues (Biotechs, Pot stocks, Tech stocks, etc…)
Lorsque j’étais à la fac, la biotech Carmat était LA valeur chaude du moment. La société avait en projet de créer un cœur artificiel autonome total, la taille du marché potentiel était énorme : tout le monde voulait des actions Carmat (et la société ne gagnait pas encore d’argent bien entendu).
Voici le cours de Carmat aujourd’hui (presque 10 ans après son introduction en bourse) :
Parlons maintenant du cas de Tilray. Tilray est un des plus larges acteurs du secteur des « pot stocks » canadiens. Avec la légalisation de « l’or vert » dans le pays, le secteur a tout simplement explosé (et la spéculation avec), jusqu’à pousser ces sociétés sur des niveaux de valorisation improbables.
Voici ce qui s’est passé sur l’action Tilray depuis sont introduction en bourse :
Ce phénomène se produit encore et encore sur les marchés. Voici les graphiques de GoPro et de Twitter (deux introductions en bourse qui avaient elles aussi fait grand bruit) :
Quand une introduction boursière se fait dans l’euphorie : un potentiel de hausse irréaliste est pricé dans le cours de l’action. Le titre n’a ensuite plus qu’une direction vers laquelle aller : le bas.
En règle générale : n’achetez jamais une société qui ne dégage pas de revenus et qui trade a des multiples élevés sur le simple espoir de revenus futurs (et surtout n’achetez rien qui fasse les gros titres de la presse financière).
En bourse, c’est ce qu’on appelle un trade « ticket de loto » (car comme ces derniers, ces actions sont très rarement gagnantes, et vous aurez le temps de perdre 10 fois votre compte avant d’en débusquer une qui soit effectivement à la hauteur des attentes excessives du marché).
3/ Vendre rapidement ses gagnants, garder ses perdants
Vendre rapidement ses gagnants (et garder longtemps ses perdants) est une autre erreur commune en bourse (qui prend ses racines dans la nature humaine). Quand nous voyons un titre nous offrir de gros profits rapidement, nous avons naturellement tendance à vouloir verrouiller ces profits.
Et lorsque nous voyons un titre de notre portefeuille accuser de lourdes de pertes, nous avons naturellement tendance à le garder en espérant que celui-ci revienne vers ses plus hauts. Pour gagner en bourse, il faut faire exactement l’inverse.
Comment cela se traduit-il? Je reçois souvent des messages de personnes me disant avoir une position sur laquelle ils essuient de lourdes pertes (50% ou plus). Ils ne savent pas alors si ils doivent couper cette position (et encaisser la perte) ou garder en espérant un rebond (au risque de continuer à perdre de l’argent)?.
La réponse à cette question est que si vous vous retrouvez dans cette situation, vous êtes déjà plus ou moins cuit, et que vous devez agir en amont pour éviter de vous y retrouver.
Vous devez toujours savoir reconnaitre quand vous vous êtes trompé sur un titre, ou que quelque chose change au niveau des fondamentaux (et réduire votre position en conséquence avant que la perte ne prenne des proportions tellement démesurées qu’elle n’en vienne détruire l’ensemble de la performance de votre portefeuille).
Pourquoi cette habitude est dangereuse? Quand on conserve longtemps un perdant, c’est souvent dans l’espoir qu’il remonte. Et comme le disent les américains : l’espoir n’est pas une stratégie. De même : quand on vend un gagnant parce qu’il est « bien monté » on agit souvent par peur que les profits générés ne s’évaporent, pas pour des raisons fondamentales ou logiques.
Dans les faits : la plupart du temps les gagnants continuent de gagner (souvent au-delà de ce que l’on pourrait imaginer au début) et les perdants continuent de perdre (souvent au delà de ce que l’on pourrait le penser également).
Un exemple de grand gagnant : LVMH
L’an dernier, l’action LVMH a connu un rallye haussier puissant, et cette société étant un champion du dividende français bien connu, plusieurs membres de la formation (et lecteurs réguliers du site) étaient positionnés dessus.
Mi-2018, les marchés ont commencé à donner des signes de faiblesse, et les prévisions boursières catastrophistes se sont succédées dans la presse financière, ce qui a fait que j’ai reçu plusieurs mails de personnes se demandant si elles ne devraient pas prendre leurs profits sur LVMH (certaines l’ont fait par peur d’un retournement de marché).
Voici maintenant le cours de LVMH a mi 2019 :
Céder à la panique durant la correction de l’an dernier signifiait rater 52% de gains sur la position en 6 mois. Cependant, il n’est pas toujours simple de conserver une action qui est déjà montée de plus de 100 ou 200%.
On pense souvent que la situation est psychologiquement difficile lorsque l’on perd de l’argent en bourse, mais elle l’est aussi lorsque l’on en gagne beaucoup (c’est pour cela qu’avoir un système composé de règles précises est essentiel pour limiter les erreurs).
4/ Manquer de diversification
Quand on démarre en bourse, cela se fait souvent avec un capital relativement modeste, et on a naturellement tendance à concentrer ses paris dans une minorité de titres. L’idée est que concentrer son argent sur quelques supers gagnants fera exploser vos performances.
Le problème, c’est qu’en bourse, les super gagnants sont relativement rares. Et que si vous débutez, vous avez relativement peu de chances d’avoir l’expérience, les connaissances et les méthodes adéquates pour identifier les 5 a 6% de supergagnants parmis les plus de 8000 actions qui cotent sur les marchés (la majorité des professionnels en sont d’ailleurs eux-mêmes bien incapables).
La plupart des « vrais » gagnants en bourse sont totalement inconnus du grand public avant leur phase de rallye, et ne font les gros titres financiers qu’après leur hausse.
Et détenir plus d’actions augmente mécaniquement les chances que vous déteniez au moins un super gagnant.
La diversification réduit aussi les chances que vous divisiez par deux votre compte de bourse dans les 6 mois (ce qui arrive à de nombreux débutants), et comme vous le savez dans doute : en bourse la protection du capital est la clé pour espérer réussir à long terme.
5/ Choisir un courtier trop cher
Comme mentionné précédemment : la plupart des investisseurs se lancent en bourse avec un capital relativement modeste (et ce n’est pas un problème, car comme je l’ai expliqué précédemment, même commencer à investir en bourse avec 100 euros chaque mois est tout à fait possible et vous mettra sur le long terme dans une position financière très appréciable).
Cependant, si vous commencez avec de petits montants, vous devez faire très attention aux frais de courtage que vous aller payer. 10 euros mensuels de frais d’inactivité sur un compte de bourse de 10 000 euros n’ont pas le même impact que sur un compte de quelques centaines d’euros.
Idem si un courtier vous facture 10 euros l’ordre de bourse, et que vous passez des ordres de 100 ou 200 euros : cela veut dire que vous payez 5 à 10% de frais sur chaque ordre passé!
Essayer de gagner de l’argent sur les marchés avec un tel poids en frais sur les épaules relève de l’impossible (chaque titre doit monter d’au moins 10% simplement pour que votre compte arrête d’être dans le négatif en terme de pertes et profits ! Et 10% constituent les rendements annuels moyens des marchés actions à long terme, ce qui veut dire qu’un courtier trop cher peut vous faire perdre un an de gains boursiers rien qu’en frais!).
La solution : Si vous démarrez avec des sommes relativement modestes (et même si vous investissez des sommes plus importantes), mettez toutes les chances de réussite de votre coté en optant pour un courtier low cost (je recommande par exemple souvent Degiro, qui propose des tarifs très bas dont vous pourrez retrouver les détails sur leur site internet).
(P.S : Attention toutefois avant de vous lancer (#disclaimer), l’investissement est une activité qui implique des risques bien réels de pertes en capital, aussi soyez sûr d’être dûment formé et préparé avant d’envisager de passer à l’action).
Conclusion
Je pense que nous avons fait ici le tour des 5 erreurs (évitables) les plus fréquentes en bourse.
Si vous connaissez des personnes qui ont commis (ou vont commettre) une de ces 5 erreurs, n’hésitez pas à leur faire suivre cet article en prévention (et si vous pensez que j’en ai oublié, n’hésitez pas à les mentionner dans les commentaires!).
Débuter en bourse en évitant tous ces écueils vous évitera de perdre beaucoup d’argent (et de temps) si vous souhaitez créer un portefeuille boursier robuste (et rentable) sur le long terme.
(P.S : Et attention toutefois avant de vous lancer (#disclaimer), l’investissement est une activité qui implique des risques bien réels de pertes en capital, aussi soyez sûr d’être dûment formé et préparé avant d’envisager de passer à l’action).
Nicolas says
Salut Pierre
Je suis en train de (re)passer par plusieurs de tes articles et comme celui-ci n’a aucun commentaire, voilà je voulais juste t’en laisser un et te dire que cet article est super intéressant.
Même si à force de lire tes autres articles et d’avoir suivi ta formation, j’avais déjà en tête ces erreurs possibles… mais c’est bien de s’en rappeler (notamment sur le fait de chasser les tendances chaudes du moment, un écueil dans lequel je suis capable de facilement tomber).
Au plaisir et encore merci de partager tout ton savoir ainsi gratuitement sur ton blog ! 🙂
Pierre says
Salut Nico,
Aucun problème et merci à toi pour ce retour positif 😉 ;
Cdt
juan says
Bonjour,
d’accord avec la diversification. Par contre, pour les rendements, il faut essayer de trouver les plus hauts relatifs. En général il y a de très bonnes raisons quand les sociétés sont faiblement valorisées mais parfois non et puis ça dépend du secteur. 6 pour cent pour un société d’immobilier côté c’est dans la norme, pour une société dans le luxe censée avoir une forte croissance, ça indique un énorme risque.
Le deuxième point, c’est au sujet de couper les pertes. De mon côté, en un peu plus de 10 ans je n’ai coupé qu’une seule ligne, et ça m’est arrivé d’avoir de grosses pertes, surtout au début. Par exemple, j’avais acheté du thales en 2009 et en 2013, j’étais toujours en perte et j’avais réfléchi à vendre contre la règle que je m’étais fixé (coupe total du dividende et perspectives négative de l’activité sur deux prochaines années)… Résultat en 2018, elle valait plus de 100 euros alors qu’elle était à 27 en 2013 plus les dividendes perçus. Bref, sans couper aucune ligne sauf une (qui est la seule action qui avait coupé intégralement ses dividendes de mon portefeuille), j’ai pourtant réussi à avoir en moyenne une surperformance de 1 à 2 pour cent (sauf la première année) sur le CAC GR (bon, ça paraît pas énorme dit comme ça et il y a des actions étrangères et des petites cap donc la comparaison est pas forcément la plus heureuse mais avec le temps ça fait quand même une sacrée différence avec le CAC GR). De même, les analyses graphiques permettant de prédire le cours d’une action j’ai jamais rien compris pour prédire des coupes donc bof, bof… Du coup, j’aimerais savoir comment tu arrives à définir quand tu vas effectuer une coupe…Parce que de mon côté, j’ai beaucoup de mal à trouver des critères très précis et j’ai tendance à diversifier de plus en plus en gardant les anciennes actions et utiliser les dividendes pour acheter de nouvelles lignes d’actions…
Donc du coup, ma question est la suivante: Comment fais-tu pour déterminer des critères de coupe dans ton portefeuille pour accentuer la rentabilité de ce dernier?
Pierre says
Bonjour Juan,
Tout d’abord pour revenir sur votre stratégie : dans le cadre d’un portefeuille très diversifié (40 ou 50 positions par exemple, toutes dûment recherchées), il est tout à fait possible de ne pas trop se préoccuper de la coupe, et de laisser la diversification faire l’essentiel du travail (même si la valeur d’une position chute de 50%, si nous détenons 50 titres, la valeur globale du portefeuille ne sera pas forcement trop impactée. Le seul critère de coupe effectif dans ce cas de figure peut être comme vous le mentionnez une coupe du dividende, ou un changement très négatif sur le business model).
Sinon pour répondre plus spécifiquement à votre question sur la coupe dans mon cas : j’utilise à la fois les fondamentaux et l’analyse technique comme guides. Usuellement, si le titre connait une dégradation de ses fondamentaux et brise un support majeur ou s’engage dans une tendance baissière durable, je vais avoir tendance à réduire ma position (idem si il y a coupe du dividende, ou que le ratio de couverture par les bénéfices devient dangereusement élevé). Pour plus d’informations sur la manière dont j’utilise l’AT en plus de l’analyse fondamentale, vous trouverez peut être quelques éléments utiles dans cet article : https://plus-riche.com/analyse-technique ;
Bien Cordialement